Education et franquisme

Hannah Arendt écrit en 1961 "Le rôle que, de l'Antiquité à nos jours, toutes les utopies politiques prêtent à l'éducation, montre bien combien il paraît naturel de vouloir fonder un nouveau monde avec ceux qui sont nouveaux par naissance et par nature". Il s'agit toujours, en effet, de former les esprits et notre Ecole issue des lois Jules Ferry avait également comme objectif d'instruire et d'éduquer les futurs citoyens d'une République naissante :

"La monarchie ne se faisait pas faute de façonner les esprits ; elle faisait enseigner la politique, celle tirée de l'Ecriture Sainte, et se fondait sur le droit divin, négation du droit des peuples. Les instructions données aux universitaires sous l'Empire prescrivaient d'enseigner les devoirs envers le chef de l'Etat. Pourquoi donc, aujourd'hui que le souverain est la nation, n'enseignerions-nous pas la politique laïque de la société moderne, les devoirs envers la Démocratie et la République ?"

Rien là que de très compréhensible. Encore faut-il s'entendre sur le sens du mot "enseigner" et sur les moyens employés pour arriver aux fins que l'on s'est fixées. Hannah Arendt en avertit le lecteur :

"Pour ce qui est de la politique, il y a là, bien sûr, une profonde erreur de conception : au lieu de se joindre à ses semblables en s'efforçant d'agir par persuasion et en courant le risque d'échouer, on intervient d'une façon dictatoriale, qui se fonde sur la supériorité absolue de l'adulte, et on essaie de mettre en place le nouveau comme un fait accompli, c'est-à-dire comme s'il existait déjà."

Ce processus se retrouve dans la formation dispensée par le franquisme au nom d'une Révolution nationale-syndicale-catholique, telle que la définit en 1942, J. Ibáñez, ministre de l'Education de 1939 à 1951 :

“El nervio de nuestro Movimiento es la Revolución que yo admito con toda la fuerza del vocablo, porque hay que revolver lo viejo y lo caduco, porque hay que arrasar lo enfermo y lo viciado y trasplantar a las almas vírgenes la enjundia de nuestro ser histórico y cultivarlas con nuevos instrumentos y sistemas, que defiendan ya para siempre de brozas y espinas la ancestral fecundidad española”.

En classe d'espagnol, la période historique et la question sont présentés à l'étude des apprenants, en général en classe de 1ère — pour un niveau B1 —à travers un certain nombre de documents particulièrement intéressants, mais abordés par le biais du commentaire de texte ou d'image, sans qu'ils soient suffisamment invités à faire les liens nécessaires pour comprendre le sens de l'entreprise générale de domestication des esprits.

L'atelier qui suit — pour des niveaux de B1 à C1 — propose de mettre en relation ces documents entre eux et de les aborder, de façon graduelle pour comprendre une époque qui semble lointaine mais dont les échos sont encore vifs. La documentation nécessairement abondante — on ne peut comprendre les situations autrement — est fournie progressivement pour permettre un traitement de l'information en fonction de la synthèse souhaitée et sous la forme d'une écriture différenciée.

Auteurs: 
Maria-Alice Médioni