Pour nous, au Secteur Langue du GFEN, l'entrée dans la langue ne peut pas être envisagée autrement que comme un travail de création, de recréation, individuel et collectif. Ceci dans un système de contraintes très fort, celui de la langue étrangère, alors même qu'il s'agit de parler, de dire une parole singulière — même si elle a été élaborée, en amont, avec les autres — avec ce qui est à disposition, à un moment précis de l'apprentissage, et grâce à ce qu'on peut faire avec. La situation élaborée par l'enseignant est de ce fait très importante pour permettre cette prise de pouvoir sur la langue.
Dans les stages que nous animons , les participants sont souvent surpris de ce qu'ils considèrent, dans un premier temps, comme des activités "périphériques" que nous proposons à nos élèves, alors que, dans leurs représentations, il s'agit d'entrer le plus rapidement possible dans l'explication d'un texte. Ce texte, ils l'ont choisi, le plus souvent, pour sa beauté et ils voudraient, de toutes leurs forces, faire partager leur émotion à leurs élèves. La déception est d'autant plus grande quand ils s'aperçoivent qu'après avoir éclairci pour eux le vocabulaire "difficile", procédé au découpage du texte en "parties" significatives à étudier successivement, puis à l'élucidation du texte par des questions qu'ils ont préparées soigneusement, les élèves "participent" peu, voire s'ennuient, et en fin de compte ne partagent pas l'émotion programmée. Mais comment pourrait-il en être autrement puisque, ce qui a été occulté, dans cette façon de procéder, c'est tout ce qui peut faire émotion, c'est-à-dire l'imaginaire, les souvenirs, les peurs, les désirs, les énigmes, les questions… qui ont présidé à la création d'un roman, d'un poème, d'un tableau ? C'est ce chemin qu'il s'agit de parcourir avec nos élèves.