Pendant plusieurs années, à mes débuts dans l’enseignement, j’ai établi à chaque rentrée, une progression, obéissant ainsi aux préconisations officielles de l’Education nationale et de mon inspecteur. Au début, « ma » progression s’inspirait largement de celle du manuel en vigueur : situation relativement confortable — pensée par des experts — qui permettait de prendre quelques initiatives, tout de même, compte tenu du « niveau » des élèves, mais qui virait rapidement à une course éperdue tout au long de l’année pour « faire le programme », accompagnée d’une forte sensation d’insatisfaction : le temps manquait pour tout faire, les élèves ne comprenaient pas assez vite, etc. Sans compter que cette programmation s’adaptait au calendrier scolaire pour me permettre de procéder aux contrôles requis régulièrement afin de pouvoir remplir le bulletin trimestriel. Je plaçais donc adroitement ces contrôles en fin de semaine ou à la veille des vacances scolaires pour me permettre de corriger plus aisément les copies. Question de survie ! Mais c’est ainsi que je me « pourrissais » week-ends et vacances et oubliais de tenir compte de l’épuisement des élèves soumis à une avalanche de contrôles placés à la même période, par des enseignants poursuivant les mêmes objectifs : se ménager du temps pour corriger et noter des copies, tâche que déjà Léon Bourgeois, ministre de l'Instruction publique et des Beaux-arts, dans sa circulaire du 5 juillet 1890, taxait de perte de temps et de peine .
De toute évidence, la très brève formation que j’avais reçue avant d’être « lâchée » sur le terrain, n’avait pas contribué à me faire sortir de la confusion entre progression et programmation.